Le péché, c’est ce que Dieu peut pardonner !
La doctrine du péché originel est souvent mal comprise, car elle heurte d’une certaine manière le sens commun contemporain. Aussi, pour bien le comprendre, on peut proposer de le voir à la fois comme :
Une expérience : l’homme découvre qu’il ne vit pas en harmonie et en confiance et qu’il a pris ses distances avec l’amour de Dieu. Il se rend compte que sa nature est blessée, que sa volonté à faire le bien n’est pas ferme. Bref, il a conscience d’une fragilité sans que cela lui soit rationnellement explicable.
Un état : l’Église enseigne le péché originel n’est pas un péché commis, personnel ; tout homme le contracte dès sa conception, car il est attaché à l’ensemble du genre humain.
Un mystère : Dieu a créé l’homme originellement bon. « Cela était très bon » (Gn, I, 31). Le récit de la Genèse nous fait clairement comprendre que ce n’est pas Dieu qui est l’auteur du mal, ni du péché, ni de la mort qui est la conséquence du péché. Celui-ci vient de l’homme ; il s’est introduit dans la Création.
Une conséquence : la nature humaine est blessée, mais non sans remède, car Dieu ne cesse de venir à son secours par son amour bien au-delà de ce que l’homme peut attendre. Cette présence de Dieu à l’homme, c’est ce que l’on appelle la grâce divine, qui est plus grande que le péché : « là où le péché a abondé, la grâce a surabondé » (Rm, V, 21). C’est pourquoi la Rédemption de l’homme par le Christ est une œuvre plus merveilleuse que la Création, car elle manifeste la plénitude de la grâce. C’est ce que chante l’Église à la veillée pascale, à propos de la faute d’Adam :
« Heureuse la faute qui nous valut pareil et si grand Rédempteur. »
Dieu a créé l’homme libre, donc libre de refuser son amour et de se défier de lui : « par la désobéissance d’un seul homme la multitude a été constituée pécheresse » (Ro, V, 19).
Mais la vraie liberté, c’est d’être libéré du péché : « libérés du péché et asservis à Dieu, vous fructifiez pour la sainteté, et l’aboutissement, c’est la vie éternelle. Car le salaire du péché, c’est la mort. » (Ro, VI, 22-23)
Le péché est « une parole, un acte ou un désir contraires à la Loi éternelle » (Saint Augustin).
Cette « Loi éternelle » dont parle saint Augustin présente des degrés :
la loi naturelle, inscrite par Dieu dans la conscience et dans le cœur de tout homme. Par conséquent, elle est accessible à tout homme, croyant ou non, notamment lorsqu’il fait usage de sa raison et obéit à sa conscience. Cette loi naturelle suppose une nature humaine universelle. Il faut insister sur cette notion, car contrairement à ce que l’on entend souvent dire, bien des jugements portés par l’Église ont pour principal appui la loi naturelle, et donc peuvent et doivent être partagés par des non chrétiens. C’est le cas pour le respect de la vie de sa conception à sa mort naturelle, qui ne se fonde pas sur une foi religieuse mais sur des arguments « philosophiques » tirés de la loi naturelle.
la Loi ancienne : la Révélation du Décalogue. Les dix commandements diffèrent de la loi naturelle par leur caractère révélé, même si sur bien des points ils ne font que la compléter. Mais ils posent la loi naturelle sur une base, qui est le double amour de Dieu et du prochain. Ils formulent aussi les commandements de Dieu en des termes précis, des interdits, dont l’observance permet d’entrer dans un chemin d’alliance avec Dieu (ce qui n’est pas le cas de la loi naturelle).
l’accomplissement de la Loi : la vie dans le Christ. La Loi nouvelle n’est plus un code d’interdits à respecter, c’est de vivre toujours dans l’amitié du Christ : « c’est à la liberté que vous avez été appelés » (Ga, V, 13).. Dans le Décalogue, la mesure de l’amour est rapportée à l’homme (tu aimeras Dieu de tout ton cœur, de toute ton intelligence, de tout ton esprit ; tu aimeras ton prochain comme toi-même) ; dans la Loi nouvelle, elle est rapportée à Dieu (aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés). De plus, la Loi ancienne ne peut pas donner, par elle-même, la grâce ; la Loi nouvelle, c’est vivre selon la grâce même de Dieu.
La distinction entre péché véniel et péché mortel permet de comprendre que l’homme que chacun de ses actes mauvais a des conséquences plus ou moins graves dans sa vie d’amitié avec le Christ.
Péché véniel : il blesse en nous la grâce sanctifiante.
Péché mortel : il détruit en nous la charité divine.
Pour juger de la moralité d’un acte, la théologie morale prend en compte trois critères, les deux derniers pondérant le premier et permettant de juger au mieux la responsabilité de la personne :
l’acte objectif lui-même, qui est bien ou mal : on ne peut rien changer à sa gravité.
l’intention.
les circonstances.
La théologie morale met également en avant un certain nombre de principes, tel le suivant : « il n’est pas permis de faire le mal pour qu’en résulte un bien. »
Résumé : le péché, c’est ce que Dieu peut pardonner !