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Questions Essentielles

Vie religieuse

Quel est le sens de la vie monastique ?

Vous passez l’essentiel de votre vie en prière. A quoi cela peut-il servir ?

Nos contemporains sont les premiers à avouer leur soif de religieux. Mais, dans leur tête, la religiosité et l’effort ne vont pas de pair. « Je médite, parce que cela fait du bien ! » Cette attitude est dangereuse car elle tend à réduire la prière à une simple expérience psychologique. Quand Dieu parle au cœur de l’homme, c’est autre chose ! Le premier fruit de la prière, c’est d’humaniser. Les Pères grecs ont écrit des pages lyriques sur la « divinisation » de l’homme... Reste que l’homme ne devient pas Dieu. Il trouve d’abord son bonheur et son humanité. La prière est l’acte humain par excellence. Et la prière du moine cherche à actualiser la prière du Christ. Comme lui, il se retire au désert, à l’écart, pour prier. Le Christ est le modèle de toute prière. Il nous délivre de l’introspection.

La vie spirituelle peut-elle combler tous les manques ?

La prière, c’est la relation absolue. Les autres relations ne nous mettent pas en contact avec le Dieu qui crée, qui parle et qui sauve. Prier, c’est découvrir la présence de ce Dieu-là. Cela suppose, de notre part, une écoute et une réponse. Saint Benoît nous conseille de vivre « sous le regard de Dieu ». Il faut toujours être certain de sa présence. Ce regard peut paraître insupportable à l’homme contemporain. Mais Dieu n’est pas un accusateur. Son regard sur nous est aimant. La certitude qui animait saint Benoît, c’est de n’être jamais abandonné. Dieu est là, immédiatement !

Saint Benoît donne-t-il des recettes pour prier ?

Il recommande une prière brève et pure. C’est exactement le contraire des pharisiens qui sont persuadés que Dieu ne comprend pas. Ils argumentent et palabrent pour mieux le convaincre. Leur divinité est aveugle et anonyme. La Règle de saint Benoît, au contraire, nous apprend à nous comporter comme des fils


Les anciens moines se battaient contre les « mauvaises pensées » et les « distractions ». Et vous ?

Les distractions, c’est un mal chronique. Il faut prier avec tout ce qui nous habite. Les distractions peuvent offrir une matière nouvelle à notre prière. Au début de ma vie monastique, j’étais responsable du chauffage. Dans une abbaye comme Saint Wandrille, c’est une véritable centrale nucléaire ! Quand le chauffage tombait en panne, je ne voulais pas manquer l’observance pour autant. J’allais donc à l’office, sans pouvoir m’empêcher de penser à la chaufferie. Il m’a fallu du temps pour comprendre qu’il fallait intégrer cette distraction à ma prière. La prière n’est pas une absence de distractions, encore moins un condensé de pensées sublimes et d’idées neuves. Prier, c’est se mettre en vérité devant Dieu. Il ne faut surtout pas attendre d’être un saint pour s’y mettre. C’est la prière, au contraire, qui nous montrera ce que nous devons faire.

La vie des moines est austère. Pourquoi ?

Je ne cultive pas une mystique de l’inconfort, de l’impossible, de l’austère. Depuis près de seize siècles, la tradition bénédictine est là pour dire que le sacrifice consenti a une grande valeur. Le sacrifice, c’est autre chose que de petits actes pieux pour obtenir un label de « chrétien correct ». Le carême est l’occasion de retrouver un peu d’ardeur spirituelle. L’âme est toujours tentée de se relâcher. L’ascèse a un sens, elle est au service de l’homme nouveau qui sommeille en nous. Elle est orientée vers le Christ.

Comment durer dans la vie monastique ?

Au départ, on est toujours motivé. Mais un passage à vide ne tarde pas à se présenter. Nous sommes trop avancés pour reculer et pas assez loin pour prétendre avoir atteint le but. Il y a forcément un temps d’épreuve. La solution ne consiste pas à s’arrêter mais à continuer. Ce qui est pauvre à nos yeux est souvent fécond aux yeux du Seigneur. Je pense au psaume 40 : « Tu n’as voulu ni sacrifice ni oblation, alors j’ai dit : Voici, je viens ! » C’est le résumé de l’expérience biblique. Abraham est parti vers le pays que Dieu lui indiquait. A vrai dire, il ne disposait que du minimum d’indications. « Mets-toi en route et tu verras ! »

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