Dans les religions archaïques il y a des spécialistes du sacré (sorciers, mages, médiums...) qui sont les seuls à pouvoir servir d’intermédiaires entre la divinité et le peuple, entre le « ciel » et la terre.
L’Évangile a supprimé cette conception de la religion. Désormais il n’y a plus de place pour des intermédiaires, car « il y a un seul Médiateur entre Dieu et les hommes, un homme, le Christ ». [1] Dans le même temps l’Evangile affirme ainsi que Jésus est incontournable, car « il n’y a pas sous le ciel d’autre Nom donné aux hommes par lequel nous puissions être sauvés » [2] C’est la grande révélation qui nous est faite le soir du Jeudi saint, grâce aux questions des apôtres Thomas et Philippe. Nous ne savons pas le chemin ? Jésus répond : « Je suis le chemin, et la vérité, et la vie. » Qui peut nous montrer le Père, et nous faire voir le Dieu invisible ? Jésus répond : « Celui qui m’a vu a vu le Père... Personne ne peut aller à la rencontre du Père, à moins de passer par moi » [3].
Par conséquent, malgré les apparences, l’idée d’aller « directement » à Dieu n’a rien de chrétien. On la rencontre d’ailleurs souvent dans tout ce qui tourne autour du New Age, dans divers programmes de développement personnel ou d’éveil spirituel. En fait par cette attitude, l’homme a la prétention d’être son propre prêtre, de détenir un savoir ou un pouvoir qui donne prise sur Dieu, finalement de se sauver soi-même, à force de concentration, d’exercices ou de bons sentiments.
Si Jésus est le seul Médiateur entre Dieu et les hommes, çà n’est pas sans conséquence pour la réconciliation du pécheur avec Dieu. Dans la Bible, le pardon et la guérison du paralysé porté par quatre hommes le montre très bien. Jésus coupe court aux murmures d’hier et d’aujourd’hui et aux contestations des scribes et des pharisiens. Il annonce la bonne nouvelle : le pardon n’est plus une réalité céleste et inaccessible, il est désormais un événement terrestre et historique, car « le Fils de l’Homme a le pouvoir sur la terre de remettre les péchés. ». Et en plus : « Un tel pouvoir a été donné aux hommes ». [4].
Cela signifie qu’à la suite des Apôtres, les prêtres reçoivent la mission, et donc le pouvoir, de remettre les péchés. Il n’y a là aucune espèce de magie. Les prêtres ne prennent pas non plus la place de l’unique Sauveur : ils tiennent sa place, ce qui est très différent. Dieu s’est fait homme pour sauver les hommes : ainsi le Christ ressuscité ne veut pas renoncer à ce contact d’homme à homme. La grâce de Dieu veut nous toucher réellement, et pas seulement mentalement. « Recevez l’Esprit Saint : les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez, ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez » [5].
De même que le Christ est le chemin le plus direct pour aller vers le Père, les sacrements de l’Église sont le chemin le plus direct et le plus sûr pour rencontrer le Christ. Prétendre recevoir le pardon « directement » c’est en réalité se pardonner soi-même, se justifier en se confiant aux belles pensées ou aux bons sentiments qu’on peut avoir. Bien sûr, c’est bien de prendre conscience de l’amour miséricordieux du Seigneur et de laisser grandir en soi un vrai mouvement de repentir. C’est même le point de départ de toute démarche vers le sacrement de réconciliation. Mais l’essentiel, c’est la rencontre. Comme dans l’évangile de Zachée : « Aujourd’hui le salut est entré dans cette maison ! » Temps de grâce où à un moment précis dans le temps, la miséricorde rencontre mon péché. Me mettre simplement à genoux, et laisser le Christ me dire : « Je te pardonne. » Là, il se passe quelque chose. Quelque chose de bouleversant !
Ainsi le prêtre n’est pas là pour enquêter sur nos nombreux péchés. Il est là au nom du Christ pour nous dire à quel point Dieu nous aime, puis pour nous aider concrètement à nous relever, à trouver des moyens de ne plus nous faire mal en tombant... D’autre part, il a une "grâce spéciale" pour oublier ! Quant on aime quelqu’un de tout son cœur est-ce qu’on pense encore au mal qu’il nous a fait une fois qu’on lui a pardonné, ?
Si oui, c’est que notre pardon n’était pas sincère !
Enfin tous les hommes sans exception connaissent des difficultés et vont s’adresser à un prêtre : alors pourquoi celui -ci nous regarderait-il différemment après qu’on se soit confessé ?
1.Lettre à Timothée 2,5
2. Actes des Apôtres 4,12
3. Jean 14,5-11
4. Comparer Marc 2,10-12, Luc 5,24-26 et Matthieu 9,6-8
5. Jean 20,22-23